Définitions -
Appellations.
On utilise
souvent le terme "milliaire" pour qualifier
les bornes ou colonnes itinéraires romaines,
mais cette appellation globale n'est pas
toujours justifiée:
- "milliaire" signifie que ces bornes
indiquaient des distances en "milles" romains
(il est probable qu'il y ait eu une borne tous
les milles romains, comme notre bornage
moderne; des bornes étaient aussi disposées
en des endroits particuliers: carrefours,
agglomérations, ponts, gués, monuments,
frontières provinciales, ...). Mille pour
mille pas; ce qui est curieux quand on se rend
compte que le mille romain mesurait 1.481
mètres. Essayez donc de faire des pas de
1,48 m. !!! En fait, l'unité de
base était un double-pas, ce qui ramène le pas
à des proportions plus raisonnables (0,74 m.,
valant 2,5 pieds romains), surtout si l'on
souligne que la taille moyenne des hommes de
l'époque était inférieure à celle de nos
condisciples. Donc: un mille romain = 1.481
mètres ( 1.478 à 1.482
selon les auteurs, ou selon les mesures ).
Abréviation sur les bornes milliaires: M
P (pour millia passuum). Nota: diverses
valeurs du pied (donc du pas) ont pu être utilisées, ce qui
a amené en certains points l'accumulation de bornes distinctes
indiquant la même distance, mais décalées. (il y avait aussi
dans ce cas l'affirmation de la suprématie de l'autorité de
celui qui refaisait le bornage, par rapport à celui qui avait
effectué le bornage initial)
- les bornes itinéraires étaient généralement
libellées en milles romains dans les premiers
territoires occupés, et dans les territoires
ayant acquis la qualité de province romaine.
Mais dans les territoires plus septentrionaux
(Gaule "chevelue"), d'autres mesures ont été
utilisées: la lieue romaine, de 2.220 mètres
(soit 1,5 mille), et la lieue dite "gauloise"
de 2.415 mètres. On parle alors de bornes "leugaires".
Indication sur les bornes : L , ou
LEUGA (LEUCA, LEUVA).
( voir, sur ce sujet, l'étude accessible sur
Internet de J. DASSIE )
Cette déviation par rapport à la méthodologie
stricte romaine était destinée à assurer la colonisation "en
douceur" des territoires conquis, en évitant de rompre
avec les habitudes locales. D'autres mesures ont aussi été
utilisées localement dans d'autres parties de
l'empire (Espagne, Grèce, Afrique,
Égypte).
Aspect
physique.
La plupart des colonnes
itinéraires sont des monolithes (pierre d'un seul bloc), réalisées
avec la pierre locale (calcaire, grès, ou granit, parfois marbre
en Italie).
La majorité
se présente sous la forme d'un cylindre (ou d'un tronc de cône)
s'élevant sur une base carrée; la hauteur était à l'origine
de 1,80 m. à 2,50 m., le diamètre moyen de 45 à 60 cm.
(le poids d'un tel monolithe atteint 2 tonnes) C'est ce
que nous pouvons qualifier de colonne-type. Ce fût cylindrique
était parfois orné de liserés, astragales, ou d'un chapiteau
de couronnement (surtout sur les voies à fort trafic autour
de Rome). Mais il existe de nombreuses variantes,
car l'installation a duré près d'un millénaire, et la fabrication
était en général locale: - certaines colonnes présentent
des méplats; l'inscription est alors faite sur une surface plane,
au lieu d'être réalisée sur la surface normalement bombée.
- il y a parfois (rarement) une plaque plane gravée, portée
par le fût cylindrique; plaque de pierre monolithe ou rapportée.
(voir VOLLORE-Ville) (cette disposition fut par la
suite utilisée sur les routes royales, du 17° au 19°
siècle) - il y a quelques exemplaires de bornes de
section carrée ou rectangulaire, et des dessins de bornes pyramidales. -
il y a également eu des réemplois - à l'époque- de
colonnes réalisées pour d'autres édifices (inachevés ou remplacés),
ce qui se traduit par des dimensions très différentes de celles
de la colonne-type. (diamètres de 0,20 à 0,30 m., bases et chapiteaux
ornés) - enfin, certaines bornes sont de véritables oeuvres
d'art; ces raretés sont principalement situées sur différentes
sorties de la ville de Rome.
Différents types de
bornes itinéraires :
Implantation.
Il est assez difficile
de préciser le mode d'implantation des bornes milliaires lors
de leur mise en service, parce que l'on dispose de peu de cas
de bornes consécutives encore en place (ou peu déplacées). Les
cas les plus représentatifs sont peut-être sur la Via DOMITIA,
entre ARLES et NARBONNE. ( à contrario, on a bien retrouvé 4 bornes consécutives
à FEURS, portant les distances I, II, III, et IIII,
mais on les a retrouvées dans un même lieu, et l'on se demande
si elles ont été réellement mises en place) Bien
sûr, on peut penser que ces bornes étaient implantées comme
des bornes actuelles le long des autoroutes, à distances fixes.
Par contre, il est flagrant que de nombreuses bornes figurent
à proximité immédiate de points remarquables: carrefours, ponts
et gués, sommets. On est ainsi devant un mélange de bornes type
actuel DDE (espacées régulièrement le long de la voie) et de
bornes "Michelin" des années 1920, situées uniquement
aux carrefours. Une autre caractéristique à
souligner est le caractère diversifié des indications (bien
que l'existence même de ces bornes sur l'ensemble du réseau
romain présente un aspect normatif d'identité). Les lieux et
les mesures indiqués étaient en général propre à un territoire
(province ou colonie), d'où l'indication "ad fines"
lorsque l'on arrivait à la frontière, semblant ignorer ce qui
se trouvait de l'autre côté de la frontière. L'origine
des mesures (le point "zéro") était souvent local;
c'était la ville la plus importante de la région, la capitale
officielle ou la ville la plus active (exception faite de bornes
monumentales symboliques: le milliaire d'or à ROME -point zéro
de l'empire-, ou -peut-être- la porte d' Auguste à NIMES). Une même voie pouvait
ainsi comporter plusieurs points "zéro", apparaissant sans doute
au fur et à mesure du développement ou de la réfection de la voie, ou du développement
des villes.
Un autre aspect de la
civilisation romaine a été la centuriation, qui a consisté en
un découpage régulier du territoire, un véritable travail de
relevés topographiques. Il n'est pas étonnant que les voies
tracées aient suivi -globalement- ce découpage, ce qui expliquerait
les bornes à la fois à intervalles réguliers, et aussi près
des points remarquables, souvent pris comme point de départ
des relevés.
A noter que
le découpage dû à la centuriation est resté effectif lors de
la délimitation des paroisses lors de l'expansion chrétienne,
et est encore visible sur la découpe cadastrale. (il en est
de même du tracé des aqueducs, autour desquels un espace inviolable
était prévu par la loi, et qui fut ensuite respecté lors
du découpage des parcelles du cadastre).
Inscriptions - Épigraphie.
Le sujet des colonnes
itinéraires nécessite d'aborder un autre domaine des
civilisations antiques: l'épigraphie, c'est-à-dire la science
concernant l'écriture sur des matériaux durables. (Petit LAROUSSE:
science auxiliaire de l'histoire qui étudie les inscriptions
gravées sur des supports durables -pierre, métal, bois, terre
cuite, etc...-)
La plupart
des colonnes itinéraires ont été gravées pour servir de bornes
indicatrices. Les inscriptions complètes comportent: -
une dédicace à l'autorité (empereur, consul, ...) qui a réalisé
ou refait la voie, avec ses titulatures (ses "titres":
empereur, caesar -ce fut un titre après la vie de l'original-,
consul, proconsul, auguste -idem que pour caesar-, puissance
tribunicienne, vainqueur de tel ou tel peuple), et parfois sa
filiation. Les formules ont varié selon les régimes, mais cette
inscription est toujours la plus importante -parfois, c'est
la seule- sur la colonne. Les titulatures sont historiquement
très importantes, car celles qui étaient à renouvellement annuel
- la plupart- permettent de dater avec précision la réalisation des voies.
(exemples: COS III indique un titre de consul pour la
3° fois, TRIB POT V indique une puissance tribunicienne pour
la 5° fois). Les récits historiques des auteurs latins (Sénèque,
Strabon, César lui-même, etc...) nous précisent les dates exactes
de ces titulatures. - une (ou plusieurs) indication(s) de
villes importantes sur le parcours, avec les distances. (exprimées,
comme on l'a vu plus haut, en milles (MP) ou en lieues (L). Les
distances étaient aussi parfois indiquées jusqu'aux frontières
du territoire (ad fines = jusqu'à la frontière)
*** NOTES concernant
l'épigraphie: a - les inscriptions sont en latin
-quelques-unes en grec-, mais avec de nombreuses abréviations:
IMP pour imperator, CAES ou CAS pour caesar, COS ou C pour
consul -ou Constantinus-, TRIB POT ou TRP ou
TP pour tribunicia potestate, AVG pour auguste -ne pas
oublier que le sigle U actuel n'existait pas à l'époque-, PF
pour pius felici (pieux et "bienheureux"), INV ou
I pour invictus (invaincu), PP pour pater
patriae (père de la patrie), P MAX ou PM pour
pontifex max (très grand pontife), etc ... Les
abréviations sont très utilisées - certaines inscriptions sont
composées uniquement d'abréviations -, ce qui, joint au fait
que les inscriptions ne sont pas toujours facilement discernables,
entraîne des interprétations différentes selon les auteurs d'analyses
épigraphiques.
exemple d'inscription
b - les inscriptions
comportent des ligatures, parfois ambigües; une ligature consiste
soit à grouper deux lettres écrites avec un seul sigle, soit
à utiliser une partie d'une lettre pour configurer la suivante.
Il est impossible de représenter ces artifices sur un clavier
d'ordinateur, pour la bonne raison que ces sigles ne sont pas
inclus dans les jeux de caractères actuellement utilisés. (C'est
pourquoi j'envisage de créer une police de caractères comportant
ces sigles; il existe certaines polices commerciales, mais incomplètes
et hors de prix).
Pourquoi les nombreuses
abréviations et ligatures ? c'est uniquement par économie, -certains
diront par paresse-, et pour hâter la réalisation. Les "lapicides"
(le terme est assez amusant, il n'est pas dans le LAROUSSE,
mais est utilisé par les spécialistes pour désigner les tailleurs
et graveurs de pierre) gravaient d'après un texte qui leur était
remis, mais il est à supposer que beaucoup étaient illettrés,
et reproduisaient au mieux, et parfois donc à l'économie, les
"signes" qui leur étaient proposés.
Les épitaphes,
ex-voto, ou dédicaces monumentales sont en général beaucoup
mieux réalisés que les inscriptions sur les bornes: écriture
fine, calibrée, parfaitement alignée, beaucoup moins d'abréviations.
c - certaines bornes
ne comportent aucune inscription; elles sont dites "anépigraphes".
On peut bien sur, dans ce cas, douter de leur rôle de borne
milliaire. (certaines n'ont manifestement jamais été gravées;
on peut supposer que certaines inscriptions étaient peintes,
et ces inscriptions ont naturellement disparu)
d - des fautes ou omissions
sont fréquentes; simplement pour le fait qu'il est impossible
de retoucher une gravure dans la pierre (ou alors il faut tout
recommencer !). Certaines présentent des tentatives
de correction, souvent maladroites: insertion d'une lettre entre
deux autres, inversion de deux lettres ("rattrapage"
improvisé), report d'une lettre en fin de ligne (le lapicide
ayant sans doute pensé: l'essentiel, c'est que toutes les lettres
figurent).
e - l'écriture de la
langue latine de l'époque ne prend pas en compte la séparation
des mots -pas d'espace- et la continuation des lignes,
d'où certaines confusions lorsqu'il y a des abréviations successives.
Toutefois, à partir d'une certaine époque, il existe des
inscriptions avec des séparations de mots nettement indiquées
(points, ou triangles, ou losanges).
f - certaines bornes
comportent plusieurs inscriptions successives; ceci est dû au
fait que les autorités qui réparaient une route avaient également
droit à la reconnaissance des utilisateurs, et faisaient inscrire
leurs titres après la première inscription qui était en général
celle du créateur de la voie. (on peut supposer que certains
"curateurs" n'ont pas eu cette délicatesse, et ont
complètement fait disparaître la première inscription pour imposer
la leur, ce qui pourrait expliquer la coupe ovoïde de certaines
bornes). ( on a pu dénombrer jusqu'à 7 inscriptions sur une
milliaire)
g - certaines inscriptions
ont été effacées dès l'époque, par martelage de la pierre. C'est
le cas des noms et titulatures de certains empereurs "condamnés
à l'oubli" , lors de leur disparition.
h - la qualité et la
lisibilité des inscriptions sur les bornes sont très variables;
leur élaboration locale, par des artisans divers, utilisant
des matières premières locales expliquent ces diversités.
Les lettres font de 4 à 20 cm. de haut, cette hauteur
variant parfois énormément sur une seule borne; les lignes sont
très rarement horizontales; le tracé des caractères varie du
plus fin et stylé au grossier à peine lisible.
i - pour ceux qui auraient
oublié le principe de numération romaine:
7 sigles principaux:
I pour 1(un), V pour 5(cinq), X
pour 10(dix), L pour 50(cinquante), C
pour 100(cent), D pour 500(cinq cents),
M pour 1000(mille). Un chiffre est
composé de ces divers sigles, disposés dans l'ordre décroissant
d'importance; il suffit d'additionner la valeur des différents
sigles pour obtenir la grandeur en chiffres arabes:
exemples: II =
2, III = 3, IIII = 4, VI = 6, XIII = 13, XXXII
= 32, CCLI = 251, MMDLXX = 2570.
sauf lorsque
l'ordre de valeur des sigles n'est pas décroissant, auquel cas
la valeur du sigle est soustraite du suivant (souci d'économie
du nombre de sigles utilisés):
exemples: IV =
4 ( 5-1, équivalent à IIII), IX = VIIII = 9, XC
= LXXXX = 90, CMXIV = 914.
Nota: du fait de ce
système, l'écriture d'un nombre peut être faite par plusieurs
combinaisons. La numération romaine ne comportait pas de
"zéro" -représentant l'absence d'objet-, ce qui interdisait
l'arithmétique telle que nous l'envisageons actuellement, et
entraine que la position d'un chiffre dans la représentation
d'un nombre n'est pas significative.
j
- La traduction des textes latins portés sur les milliaires
est variable selon les traducteurs, pour une raison simple:
la langue latine ne comporte pas d'articles, au sens actuel;
le "rôle" d'un mot est défini par sa terminaison (déclinaisons:
rosa, rosa, rosam, rosae, rosis, rosarum, etc ...); or, du fait
des abréviations, nous n'avons pas souvent la terminaison des
mots. IMP peut signifier: l'empereur, à l'empereur, les
empereurs, aux empereurs, etc ... Les traductions
font souvent appel à des comparaisons avec des textes plus complets
du même sujet ou de la même époque.
k
- Autre remarque, qui est évidente (mais qui, comme telle, n'a
pas immédiatement justifié une mention de ma part !) : l'écriture
romaine ne comprend qu'un type de caractères, que nous appelons
aujourd'hui "majuscule". Cette particularité, ajoutée
à celles mentionnées ci-dessus (abréviations, non séparation
des mots, coupures arbitraires en fin de ligne) ne facilite
pas l'interprétation des inscriptions.
Nomenclatures.
Il en existe assez peu
de générales, permettant de retrouver les bornes milliaires.
Par contre, d'importants recueils d'inscriptions latines ont
été établis au cours du 19° siècle, et de nombreux addenda
ont été établis par la suite.
Le monument
incontournable reste le CIL (Corpus inscriptionorum latinarum)
initié par l'allemand Theodor MOMMSEN, assisté d'une importante
équipe. Cette publication recense toutes les inscriptions latines
relevées au cours du 19° siècle, et auparavant, y compris
des inscriptions illisibles. L'ouvrage complet comprend 16 tomes,
et est rédigé entièrement en latin. Cet ouvrage considérable
est d'autant plus important qu'il cite des inscriptions aujourd'hui
disparues (objets perdus ou détériorés), ou illisibles (la pollution
n'avait pas encore sévi). Par contre, la localisation des inscriptions
n'est pas toujours précisée, ou bien les objets portant les
inscriptions ont été déplacés. De ce recueil
global a été tiré un 17° tome ("Miliaria Imperii Romani"),
consacré exclusivement aux bornes milliaires. Le volume
CIL 17-2 concerne plus spécialement les bornes que l'on peut
trouver en Europe occidentale ("Miliaria provinciarum Narbonensis
Galliarum Germaniarum").
Un autre
recueil, publié sous forme de fascicules périodiques, a pris
le relais du CIL: c'est l' AE "l'Année Épigraphique",
qui parait régulièrement depuis 1888.
D'autres
recueils existent également, mais partiels, portant soit sur
un sujet précis, soit sur un région délimitée (voir bibliographie
"Inscriptions latines").
De nouvelles
études sont plus récentes: Gerold WALSER a repris le CIL
consacré aux bornes milliaires, en le rendant plus complet et
plus facile à consulter (1986), et d'autres réalisations sont
en cours, principalement à l' Université de ZÜRICH (suite de
l'oeuvre de G. Walser par Anne KOLB), et la mise en ligne
sur Internet conjointement par l' Université Goethe de FRANCFORT
et l' Université catholique d' EICHSTÄTT - INGOLSTADT, sous
la direction de Manfred CLAUSS. ( voir "Liens")
Ce qu'il en reste.
C'est finalement
le sujet que je voulais aborder, par l'illustration !
Il se trouve que je connaissais des bornes milliaires
sans le savoir (j'étais passé plus de cent fois à côté, sans
soupçonner leur nature); lorsque j'ai réalisé cette lacune,
j'ai cherché à savoir ce qui restait de ces modestes monuments.
Et ma curiosité n'a pas été déçue; car le sujet est passionnant,
et nécessite de véritables enquêtes policières. 1)
de très nombreuses bornes, répertoriées au 19° siècle ou avant,
ont été perdues. 2) de nombreuses bornes,
bien visibles et dont l'inscription est lisible, n'ont jamais
été répertoriées. 3) de nombreuses bornes
ont été réutilisées: dès les premiers siècles chrétiens,
dans la construction des églises (voir VALENCE), l'implantation
des croix de carrefours (voir VAGNAS, St GERMAIN) et la réalisation
de tombeaux (voir BRUERE-ALLICHAMPS, CENON), bénitiers (voir St PAUL d'Izeaux, SAILLANS),
et plus récemment
dans des réalisations des plus hétéroclites: fontaines (voir
CHANAS),
monuments aux morts, et ... rouleaux de jardin (je ne
citerai pas de nom de lieu !). Certaines tentatives de
réutilisation n'ont pas abouti: voir les tentatives de sciage
à PONT de Labeaume, et à MOINGT. 4)
à de rares exceptions près (midi de la France), toutes les bornes ont été déplacées
(très peu subsistent sur leur lieu d'implantation originel),
soit pour enrichir des collections (c'était à la mode au 19°
siècle, celui des "antiquaires"), soit à cause de
travaux (voirie, remembrement des terrains agricoles). Ce qui
est plus à déplorer, c'est qu'on ignore l'emplacement d'origine;
on peut tenter de le trouver, à condition de pouvoir lire l'inscription
du lieu le plus proche et sa distance, de connaître l'emplacement
de ce lieu, de savoir sur quelle voie la borne était située,
et de connaître le tracé de la voie; ces conditions sont rarement
toutes réunies. 5) l'appellation des bornes
est souvent déroutante; - certaines sont nommées
par leur lieu d'origine -qui, comme on vient de le dire, est
souvent incertain-. (le CIL, entièrement
en latin, cite le nom des villes romaines, dont l'emplacement
n'est pas toujours assuré, même de nos jours) - ce
lieu d'origine est parfois un lieudit, ou le nom d'une ancienne
paroisse. - certaines sont nommées d'après leur lieu
de conservation (qui peut avoir varié depuis le dernier inventaire).
- certaines, après une première découverte au cours du
19° siècle, ont été perdues, puis retrouvées par la suite, en
un lieu différent. Ce qui entraîne le fait qu'une même borne
peut apparaître sous diverses appellations dans une nomenclature
non vérifiée. A. GRENIER (1934) mentionne que
sur un effectif d'environ 550 bornes pour les Gaules,
on n'en connaissait (officiellement) qu'une dizaine au début
du 19° siècle; c'est au cours de ce 19° siècle (qualifié de
"siècle des antiquaires") que des recherches et des
recensements ont été très actifs. Ces découvertes ont été facilitées par
plusieurs facteurs historiques : les premiers remembrements
de terres, le renouveau des constructions catholiques (démolition
d'anciennes églises, terrassement pour de nouveaux édifices
-après les dégats occasionnés par la Révolution-), et l'émergence
de corps académiques, dans la lignée Napoléonienne. Prosper
MERIMEE (1803-1870) fut (le premier) Inspecteur des Monuments
historiques.
Les tentatives actuelles
d'inventaire partent sur des bases qui sont à réviser; j'ai
consulté longuement la base (qui n'est pas encore complète)
de FRANCFORT-EICHSTÄTT (Manfred CLAUSS), et je leur ai fait
parvenir la liste INSEE des communes, afin qu'ils puissent utiliser la
liste des communes actuelles, avec l'orthographe exacte (globalement,
un nom sur trois était mal orthographié, soit par emploi d'une
orthographe ancienne, soit par erreur de transcription, soit
par manque de normalisation: les communes portant un nom de
saint se trouvaient sous 4 rubriques: Saint xxx, St xxx, Saint-xxx,
St.-xxx). Un minimum de normalisation est absolument nécessaire
pour une base informatique, car un ordinateur ne peut pas vous
dire instantanément que St et St. sont l'équivalent de Saint.
( Manfred CLAUSS a d'ailleurs eu l'amabilité de me remercier
pour cet envoi) En ce
qui me concerne, mon but étant d'actualiser ces connaissances,
je nomme les bornes par le nom actuel de leur commune d'implantation
d'origine, ce qui n'est pas toujours facile (ma nomenclature
personnelle comprend plus de 500 bornes pour l'espace actuel
de la France -y compris les bornes disparues-, mais environ
cinquante nécessitent une enquête de localisation, car je suis
incapable, à priori, de déterminer la situation du lieudit,
et même le département dans lequel il se trouve).
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